Nouvelles du Perrierkistan
Le Perrierkistan est une petite municipauté dans la Bapouatoustan, appartenant à la Vicomté du Ventrachoustan, elle-même incluse dans le Sarkozistan - son Vicomte, un moment rebelle, ayant refait acte d’allégeance. Elle est dirigée par un mairipaute (l’orthographe en est imprécise, beaucoup écrivent mairipote, comme despote, forme de gouvernance fort à la mode dans le Sarkozistan et son petit « Grand Calife » dont le mairipote est un féal, mais d’autre trouvent la terminaison « pote » peu adaptée).
Les opposants ayant fait indécemment preuve d’humeur, devant le despotisme de moins en moins déguisé du mairipaute, en ne siègeant pas à un conseil de municipauté, transformé en chambre d’enregistrement, un sous-vizir a brandi la riposte absolue : il ne serrerait plus la main à l’infâme chef de cette intolérable opposition. Il faut savoir que c’est une coutume des habitants du Sarkozistan que de se prendre réciproquement la main droite. Un manant, pour avoir refusé de toucher celle majestueusement offerte par le petit Grand Calife a eu droit de la part du despote à un « KAS’TWAPOVKON », ce qui traduit donnerait « Hors d’ici misérable individu au quotient intellectuel faible » (ce qui prouve, au passage, que la langue de ce pays cocasse est très dense).
On le voit les représailles sont redoutables et l’horrible chef de l’insupportable opposition doit en trembler d’effroi.
Les causes mêmes de cette brouille sont assez peu compréhensibles pour nos lecteurs, habitués à une gouvernance civilisée où, a priori, aucun avis n’est méprisé, où l’on prend le temps d’étudier les projets, d’en discuter, de chercher à concilier les points de vue, dans l’intérêt de tous. Pour faire vite, le mairipaute, après avoir fait traîner un dossier de ce qu’ils appellent « Maison médicale », s’est, d’un seul coup – il fonctionne souvent au coup de tête – décidé à le mener à bout, au plus vite. Quatre ans de tergiversations, puis en avant à tombeau ouvert (ce qui n’est pas de bon augure). Mais les locaux visés, au cœur de la ville, servaient à une association accueillant des enfants en bas âge. Qu’on déménage cet accueil aux portes de la ville, en se débarrassant de l’association au passage et l’affaire est faite.
Une étude plus sereine et surtout plus collective aurait, peut-être permis de trouver des solutions plus adaptées. Inverser les localisations, par exemple. Avec un coût moindre globalement… Cela n’est bien sûr qu’une hypothèse naïve d’un observateur étranger, peu au fait des arcanes des « compétences » (mot insolite en l’occurrence) imbriquées entre municipautés réunies dans des regroupements aux noms variés. Ainsi, en Bapouatoustan, comme ailleurs, il vaut mieux construire une nouvelle maison pour accueillir les petits enfants, dans un endroit inapproprié, car elle sera financée par un de ces groupements. Quitte à dépenser énormément dans l’ancien local pour y aménager l'accueil des professions de santé. L’argent ne semble d’ailleurs pas un problème. Le mairipaute qui avait fait de sa municipauté une des plus endettées de tout l’ouest du Sarkozistan, n’en agite pas moins des sommes fabuleuses: 950 000 ici, 4 500 000 là ; mais sans dire d’où tombait cette manne, alors que le remboursement des dettes qu’il a creusées est loin d’être fini. Quant au calendrier qu’il affiche – sauf pour les écoles publiques, pourtant obsolètes – s’il était tenu, mériterait d’être inscrit dans un livre des records. Des observateurs locaux, malveillants, parlent d’ « effets d’annonce » et reprennent la formule d’un ex-vizir « Les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent ».
Que cette plongée dans les mœurs politiques du Sarkozistan profond, ne vous décourage pas d’y faire du tourisme, bien que l’aspect général de la ville fasse penser à ces belles négligées qui cachent une propreté douteuse sous un épais maquillage et force parfums : artères fleuries à profusion, mais trottoirs sales et mal entretenus.
Bachy Bouzouk,
grand reporter de Syldavie Soir
Pcc Yann Hual
N. B. Il semble que notre pays fasse l'objet d'attention de la presse internationale comme en témoigne les chroniques du Sarkozistan sur "Arrêt sur images" ; mais contrairement à son collègue ouzbeck, notre syldave n'a pas hésité à aller au coeur du Sarkozistan.
http://lucius-lucon.info/cm27-09.htm